Rockies, nous voilà !
Notre première nuit face aux montagnes. Nous avons trouvé un petit coin où dormir à la fin d’un chemin en gravier, à l’angle d’un pré. Nous observons le soleil se coucher et illuminer d’une teinte rose-orangée les falaises qui se dressent devant nous. Après des journées de chaleur intense, nous retrouvons la fraicheur et nous passons enfin une nuit agréable (sans moustique également).
Le lendemain, direction le parc national du lac Waterton à l’extrême sud des Rocheuses du Canada (car tout comme le Covid, elles ne s’arrêtent pas aux frontières) et nous sommes assez excités, enfin, avouons-le : hyper excités !
Nous prenons la route et le paysage est exceptionnel. Une vallée enherbée dans laquelle serpente une rivière formant de grands lacs encerclés par des montagnes. Nous arrivons à Waterton. Une ville dans un parc, c’est la première fois que nous voyons ça, cela nous parait un peu étrange, mais le cadre est agréable. C’est notre premier parc dans les Rocheuses et on sent quelque chose de particulier ! Oui, ça sent le tourisme à plein nez ! Fort heureusement pour nous, les frontières étant fermées depuis plusieurs mois, il n’a que des locaux (enfin des Canadiens). Ni une, ni deux, après avoir récupéré quelques renseignements auprès d’une passante (beaucoup plus instructive que le jeune guide de l’accueil), nous enfilons nos sacs à dos et nous voilà partis ! Une journée d’une vingtaine de kilomètres nous attend.
On est super content de marcher, le temps est frais, il fait beau, bref, les conditions sont idéales ! Nous commençons par traverser une forêt complètement brulée. Le feu a ravagé la quasi-totalité du parc en 2018 qui reste, en partie, clos aux visiteurs pour la régénération des milieux. Les arbres ont donc sorti leur plus beau costume léopard. Le chemin monte tranquillement, nous arrivons à un premier lac superbe, d’un bleu intense. Alors que je m’extasie devant le spectacle, je vois le visage de Geo se déconfire. Il scrute la surface de l’eau et me dit d’un air triste : “ça gobe à fond !”. Ce qu’il faut traduire par : “Il y a un max de truites dans ce lac !”… Bref, il n’a pas pris sa canne à mouche et il ne connait pas les réglementations de pêche dans cette province (pour info, nous sommes en Alberta, à la frontière de la Colombie-Britannique et des USA).
Nous continuons notre ascension. Le ciel s’est couvert et le vent s’est levé. Nous prenons notre pique-nique à l’abri contre un rocher face à un second lac avant d’atteindre le sommet qui culmine à 2520 mètres. La montagne est rougeâtre et contraste avec le vert des sapins. Depuis ce belvédère naturel, nous observons la chaine de montagnes infinie qui se dresse devant nous. En redescendant, j’aperçois un animal étrange, une sorte de gros chat. Nous nous rapprochons et je comprends qu’il n’en est rien, il s’agit en fait d’une marmotte. Allez, je vois déjà les moqueries arriver, comment confondre une marmotte et un chat ?! Pour ma défense, les marmottes des Rocheuses sont bien différentes de notre espèce alpine, elles sont tricolores : (marron, grise, beige), mastocs et plutôt lentes, d’où la confusion avec le chat domestique (depuis ce jour je ne suis plus crédible en écologie aux yeux de Geoffrey).
Notre chemin croise celui de 4 jeunes locaux venus camper une nuit. Nous passerons le chemin du retour à discuter de tout et de rien avec eux comme si nous les connaissions de longues dates. Cela fait parfois du bien de discuter avec d’autres personnes que mon fidèle acolyte (et c’est réciproque ahah !).
Nous revenons enchantés et épuisés de cette journée. D’ailleurs, nous n’avons pas fait de vieux os à la nuit tombée.
Le lendemain, c’est reparti ! Nous décidons de faire plusieurs petites randos à la suite. Bizarrement, le parc a quelque chose de différent aujourd’hui. D’abord, il y a une file d’attente à l’entrée et la circulation semble plus dense. Puis, arrivés au “Red Canyon”, nous écarquillons les yeux devant la foule ! Que s’est-il passé pendant la nuit ? Les frontières ont réouvert ? Un bus « d’asiatiques » en a profité pour débarquer (rien de raciste, c’est un fait) ? Nous descendons de la voiture complètement déstabilisés et avançons vers le canyon où, malgré le panneau d’interdiction, une foule de touristes est sur le bord de l’eau en train de prendre des selfies… Quelle déception ! Alors qu’hier nous avions l’impression d’être peinard en rando, aujourd’hui, nous hallucinons sur le monde qui nous étouffe et ternit le paysage.
On décide de fuir cette foule. Je marche sur le parking en direction du van lorsque je remarque une boule marron qui traverse la route… un ours ! Je l’observe traverser à l’entrée du parking au milieu des gens qui circulent et qui ne semblent même pas le voir (ce qui semble réciproque). Je me retourne mais Geo est déjà au véhicule et m’attend. Je presse le pas, monte et lui dit : “Dépêche, il y a un ours brun, tu vas le rater !”.
Je précise que le “brun” à son importance car jusqu’à maintenant nous avions vu uniquement des ours noirs. Nous serions peut-être face à notre premier grizzli ! Nous le retrouvons le long de la route, il y a un petit avec lui (elle du coup), nous sommes sous le charme et nous oublions quelques instants la foule !
A l’heure où j’écris cet article, je ne suis absolument pas sûre qu’il s’agissait d’un grizzli. En effet, la couleur du pelage n’est pas un indicateur de l’espèce. Waterton étant un milieu ouvert et ensoleillé, il y a de grandes chances pour que le pelage d’un ours noir soit brun. L’élément majeur pour distinguer les deux espèces est la bosse uniquement présente entre les deux épaules du grizzli.
Mais à ce moment-là, nous étions encore novices (pour rappel, j’ai confondu une marmotte avec un chat la veille) et nous étions juste heureux de voir nos “premiers grizzlis”.
Nous fuirons la foule en faisant une petite rando de quelques kilomètres dans un autre secteur du parc. L’avantage de ce genre de touristes, c’est qu’ils sont faciles à semer.
Après tout cela, nous reprenons la route en direction la Colombie-Britannique (BC), dernière province de l’ouest, dernière terre avant le Pacifique. La frontière suit la chaine des Rocheuses. Nous arrivons sur l’autre versant, dans une petite ville nommée Fernie, qui ressemble en tout point à un village de station de ski (en même temps, c’en est un). Pour profiter des montagnes, nous partons en randonnée depuis un lac vert jade jusqu’à un sommet offrant un belle vue sur la vallée de Fernie et les Rocheuses.
Nous découvrons également l’une des choses les plus exceptionnelles de cette province : les “Sites Récréationnels » ou « Rec Site » pour les initiés. Il s’agit initialement de bases développées par les services forestiers de la province pour explorer le territoire. Aujourd’hui, ce sont des sites de camping publics et gratuits, situés pour la plupart, au niveau d’un point d’intérêt, le long d’un lac, une rivière, une cascade ou en montagne. Il en existe plusieurs catégories, du plus rustique (toilettes sèches + cercle de feu) au plus confortable (toilettes sèches avec papier toilette + cercle de feu). D’un point de vue accessibilité, il y en a pour tous les goûts, du chemin empruntable par une caravane-maison, au sentier de 4×4 en passant par le canotage et ça, sur des distances allant jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres (oui oui, ça sent gros les pépins mécaniques tout ça). Pour être honnête, aller sur un site récréationnel est souvent une aventure en soi.
Ces sites ont littéralement transformé notre voyage. Auparavant, comme tout bon nomade, la recherche d’un lieu où dormir était notre préoccupation majeure à partir de 18h00. C’était particulièrement vrai au Québec, où nous avons parfois cherché un lieu pendant près d’une heure pour finalement finir sur un parking à côté d’une église. Aujourd’hui, à 18h00, nous savons qu’un site récréationnel nous attend, qu’il sera le long d’un point d’eau et le plus souvent dans un cadre incroyable. Nous sommes admiratifs de ce système pour l’opportunité de vacances qu’ils offrent à la population (14 jours consécutifs de droits de séjour).
Vous l’aurez compris, nous nous sentons bien dans cette province, nous avons le moral à bloc et avons hâte de continuer à explorer ces paysages.
Nos photos par ici.
2 réflexions sur « Rockies, nous voilà ! »
Coucou les aventuriers ! Votre récit fait plaisir à lire, et les photos sont super belles !
Vous n’êtes pas sans savoir que ici la vie est un peu moins fun (certes, vous n’êtes plus là, mais la covid y fait aussi …). Avec le recul, mais c’est peut-être déjà le cas, vous vous rendrez compte que vous n’auriez pas pu partir au meilleur moment, haha ! En espérant que quand vous rentrerez, masques, gestes barrières, restrictions horaires et couvre feu feront partis du passé.
Gros bisous, continuez à profiter !
Gros bisous à vous deux. Profitez bien de cette vie que vous croquez à pleines dents. Toujours un vrai plaisir de lire le récit de vos aventures. ici effectivement la vie se complique un peu plus chaque jour sans que l’on décèle une piste d’amélioration. L’insouciance de certains nous pousse vers de nouvelles contraintes. pour vous loin du monde et de la densité humaine la vie est belle et c’est très bien. Profitez bien. Gros bisous.